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ÉCHO des pressoirs

 

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L'écho des pressoirs n°218 juin 2014

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Editorial de Jean-Louis : Allez les verres !

La dégustation : un sport qui exige du matériel.

Qui a fait l’expérience déconcertante de goûter, à son insu, le même vin dans deux verres de forme et de contenance différentes et en a fait deux commentaires très divergents a appris à ses dépens combien le contenant parvient à modifier la perception de son contenu.

Si donc la relation de la coupe aux lèvres peut induire un prisme aussi déformant, quel est le verre idéal pour une dégustation ?

Le verre INAO ?

On pense en effet immédiatement à l’incontournable verre INAO, reconnu par le fameux Institut National des Appellations d’Origine. Avec ses cotes normalisées et sa forme dite tulipe, il a en effet été adopté comme verre uniforme de référence en 1970 dans les dégustations officielles. De plus, comme son brevet n’a jamais été déposé à l’INPI, il a de plus été abondamment copié, avec plus ou moins de bonheur, partout dans le monde. La forme particulière de ce verre s’explique par sa double fonction : à la fois développer des arômes dans son tiers inférieur évasé, puis les concentrer vers le nez dans ses deux tiers supérieurs plus resserrés.

Gros avantage: ce verre est universel et peut donc servir à déguster aussi bien les blancs, les rosés et les rouges que les effervescents, pour un premier prix d’environ 1,50 € l’unité. Le véritable verre à vin INAO, toutefois, est en cristallin, un verre contenant 9 % de plomb. Quant au cristal véritable, il en contient 24 %, car c’est le plomb qui donne cette brillance et ces reflets caractéristiques du cristal.

Mais cet avantage est aussi une limite, car les vins appartiennent à des familles fort disparates qui imposent au verre idéal un « cahier des charges » variant très sensiblement d’un type de vins à l’autre.

Les Impitoyables de Peugeot ?

C’est à cette différenciation que s’est attelé notre Peugeot national en créant sa « bande des quatre », les bien nommés Impitoyables, formule 1 de la dégustation (compter environ 65 € chaque verre).

Ces verres ont été créés dans le but d’amplifier les perceptions de la dégustation en fonction du type de vins auxquels ils sont destinés. Ils permettent avant tout un meilleur ressenti des arômes, déterminants dans la perception du goût, en braquant comme une lentille grossissante sur les qualités, mais aussi –voire surtout- sur le moindre défaut du vin dégusté.

• N°1 – L’impitoyable des vins rouges jeunes. Sa forme très angulaire crée une turbulence avec le liquide qui y est versé et ménage une importante surface d’oxygénation qui accélère plus particulièrement la libération des arômes primaires propres aux vins rouges jeunes. Ce verre convient donc aussi parfaitement pour la dégustation des vins rosés.

• N°2 – L’impitoyable des vins blancs. Ce verre est doté d’une très haute cheminée se refermant très étroitement vers le haut grâce à des bords fortement recourbés. Son volume et sa forme permettent ainsi aux arômes nettement plus volatiles du vin blanc à la fois de se libérer dans le corps du verre et d’y rester plus longtemps piégés, permettant ainsi une meilleure perception de toute l’étendue de leur variété (primaires, secondaires et tertiaires). De ce fait, la température fraîche du vin y est également plus longtemps conservée.

• N°3 – L’impitoyable des vins rouges vieux. Afin de limiter leur oxygénation, les parois tout en rondeur de ce verre permettent d’aérer les honorables vieillards avec plus de ménagement qu’avec l’impitoyable N°1. Sa forme ovoïde généreuse favorise ainsi davantage un épanouissement rapide des arômes tertiaires caractéristiques des grands rouges bien matures.

• N°4 – L’impitoyable des vins effervescents. Les arômes d’un effervescent étant libérés avant tout par les bulles, ce verre est destiné à favoriser leur formation et leur dégagement. Il possède donc à sa base un cône pointu qui favorise la naissance de colonnes de bulles et, à ce même effet, ses parois internes sont entièrement tapissées d’aspérités. Ce procédé inventé au XVIIIe siècle est né de la constatation que les bulles naissent des irrégularités du verre.

Un verre par cépage et par région ?

De plus, poussant encore plus loin la différenciation, des affinités électives se tissent entre une forme de verre et un cépage (cf. l’impressionnante collection de verres-cépages chez Riedel notamment), ou entre un type de verre et une région (verres à vin de Loire en forme de ballon, verres à vin d’Alsace également en forme de petit ballon mais sur un pied fin souvent coloré). Parmi ces verres régionaux, attardons-nous au moins sur les deux plus emblématiques : le verre à Bourgogne et le verre à Bordeaux.

• Verre à Bordeaux: de forme tulipe proche de celle de l’INAO, il est plus effilé que le verre à Bourgogne. Cette forme permet de développer dans sa partie basse équitablement toute la gamme des arômes, puis de les concentrer vers le nez. Ce verre est idéal pour déguster des Bordeaux aux tannins parfois un peu durs dans leur jeunesse et donc plus lents à s’ouvrir.

• Verre à Bourgogne : la différence entre les deux est la forme de lyre en arrondi propre au verre à Bourgogne, avec un diamètre extrêmement large à mi-hauteur. Cette grande surface de contact avec l’oxygène convient parfaitement au pinot noir dont les vins concentrés en fruit nécessitent une oxygénation poussée pour libérer leurs parfums. Proportionnellement à sa surface d’oxygénation, son ouverture est toutefois encore plus resserrée que celle du verre à Bordeaux, car après les avoir libérés dans le verre il importe d’inviter les arômes primaires plus volatiles du pinot à s’y attarder un peu.

Quant aux verres-cépages, retenons seulement que, d’une manière générale, les verres à vin blanc sont moins larges que les verres à vin rouge. C’est là encore une question d’oxygénation, car beaucoup d’appellations perdent en nuances au contact de l’air. On choisit donc des verres à l’ouverture plus petite, qui offrent en outre l’avantage de mieux conserver les arômes plus fugaces du vin blanc.

Et pour le Champagne, flûte ou coupe?

Le cœur du champagne, c’est la bulle. Elles sont 80 millions dans une bouteille et environ 2 millions dans une flûte. Le choix entre coupe et flûte a une influence primordiale sur la grosseur de ces bulles. Car on le sait, les bulles grossissent lorsqu’elles remontent dans le verre : plus leur parcourt est long plus elles finissent grosses. Elles seront donc plus grosses dans une flûte que dans une coupe. Pour être précis, une flûte de 10 cm de haut engendrera des bulles d’un millimètre de diamètre (et une flûte haute de 20 à 30 cm génèrera même des bulles de 2 ou 3 mm). Pour la coupe, en revanche, le dégazage est accéléré et les bulles restent plus petites.

Au final, match nul pour ces deux verres: honte à la flûte, incapable de générer ces fines bulles si recherchées dans les grands Champagnes millésimés. Elle génère au contraire des bulles trop grosses qui, de l’avis des producteurs, gêne les sensations en bouche par la projection de leurs gouttelettes à plus grande vitesse au moment où le vin est porté aux lèvres. Mais honte aussi à la coupe dont les bords évasés laissent échapper ces précieux arômes avant même que le nez n’ait pu les capter. Idéalement le Champagne se dégusterait donc mieux… dans un simple verre à vin blanc. Flûte alors!

Et si l’on se retrouve perdu sur une île déserte, sans INAO ni Riedel? 

Dans tous les cas, on voit au moins émerger deux constantes. Quel qu’il soit et à quelque vin qu’il se destine, un verre :

- doit être suffisamment vaste. Un verre d’environ 30 cl semble être l’idéal pour la plupart des vins : une taille plus grande pour les grands crus rouges jusqu’à 35 cl, plus petite pour les vins moelleux, liquoreux ou les vins doux naturels type Banyuls ou Maury etc. Il faut savoir que plus le disque est large, plus les arômes se libèreront rapidement.

- se remplit toujours au tiers pour qu’il puisse se développer et dégager ses arômes dans un espace propice à leur perception, et aussi pour qu’on puisse y faire tourner le vin sans risque afin de l’aérer ou l’observer. La limite de remplissage se situe au niveau de la partie la plus large du corps, permettant une évaporation maximum et une diffusion des arômes.

Peu importe le flacon, mais pas ce dans quoi on le verse!

Jean-Louis

Note du webmestre

Offrez une coupe de Champagne, mais servez la dans une flûte !

Le Champagne en coupe: une hérésie à réserver aux fontaines de champagne destinées à montrer la munificence des invitants ! Il s'y forme un cordon de mousse, mais il persiste deux secondes, les arômes primaires chers à Jean-Louis durent encore moins longtemps. Et essayez donc de faire tourner le vin dans votre verre sans en verser sur la robe de votre voisine ?

Le site champagne.fr, assez compétent en la matière, indique que le verre forme tulipe est le verre idéal :

flutes

mais à mon sens trois de ces verres sont des flûtes, et un seul un verre tulipe. Ce dernier est d'ailleurs suffisamment haut pour que les bulles montent et s'accumulent en un joli cordon, et la cheminée qui se referme va concentrer les arômes, et peut donc offrie un bon service de votre champagne.

Mais le verre idéal est le second en partant de la gauche, il suffit de regarder la magnifique colonne de bulles qui s'y développe ! Baccarat avait d'ailleurs créé au XIX° siècle une flûte « impossible », où la cuvette était soudée directement sur le calice, maximisant ainsi la hauteur du contenant.

Autre avis autorisé : le site des maisons de champagne, qui affirme « la coupe est indéfendable ». Vous trouverez dans cette page, en plus d'un historique des verres à champagne, des images de magnifiques créations des cristalleries françaises ou italiennes.

 

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