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ÉCHO des pressoirs

 

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L'écho des pressoirs n°287 avril 2024

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Editorial d'Armelle : au Royaume-Uni, la nouvelle réglementation viticole envoie valser la vieille Europe.

Avec son vignoble en plein boom, le pays devient un challenger inattendu de l’industrie viticole, à la fois acteur et maître de ses nouvelles règles. Pour le meilleur ?

Longtemps importateur, le pays est devenu petit à petit un pays producteur en pleine expansion. (Ben Stansall/AFP)

A partir du 1er janvier 2024, les Anglais feront tout ce qui leur plaît avec le vin. Ou presque. Jusqu’ici, faute d’avoir voté de nouvelles réglementations sur l’industrie viticole, le Royaume-Uni avait conservé les lois européennes qui en régissaient le commerce. Les modifications post-Brexit, publiées le 16 octobre, s’apprêtent à changer la donne.

Longtemps importateur, le pays est devenu petit à petit un pays producteur en pleine expansion : les vignes, plantées pour la plupart au début des années 2010, commencent à se frayer une petite place sur le marché mondial. Treize ans plus tard, des maisons du Kent et du Sussex commencent à percer, comme le domaine Simpsons (38 hectares, 250 000 bouteilles par an de chardonnay, pinot noir et pinot meunier) ou encore la Balfour Winery pour ses rosés pétillants. On compte aussi une poignée de producteurs de vin naturel, dont les remarquables Domaine Hugo, dans le Wiltshire (en biodynamie) ou encore Westwell Wines, dans le Kent (en conversion bio, difficilement trouvables hors Royaume-Uni). Un marché en mouvement et qui s’octroie aussi, en pleine réécriture identitaire, de nouvelles règles.

Piquette, bouteille moins lourde et vins sans alcool

Là où de nombreux pays producteurs européens (France, Italie et Espagne en tête) ont choisi de protéger la qualité de leurs vins par un système d’appellations contrôlées, les Anglais, eux, envoient tout valdinguer. En Europe, est appelé « vin » une boisson de raisin fermenté dont le degré alcoolique est situé entre 8,5 % et 15 %. Au Royaume-Uni, à partir du 1er janvier 2024, un jus de raisin fermenté pourra être appelé comme tel même s’il présente moins de 8,5 % d’alcool, voire pas d’alcool du tout : la boisson pourra même être appelée « vin sans alcool », ce qui était techniquement interdit à ce jour.

Parmi les autres règlements adoptés, la mention de l’origine ne sera plus obligatoire. Qu’ils soient importés ou non, les vins n’auront plus à s’embarrasser de cette politesse sur leur étiquette. Il sera aussi possible d’ajouter du sucre ou du dioxyde de carbone à ses jus, de mélanger les cépages sans restrictions, ou encore de commercialiser la piquette, cette boisson créée à partir de marc et de sucre – une façon de revaloriser les « déchets » de la vigne. Mais jusqu’où le Royaume-Uni admettra-t-il la commercialisation de vins potentiellement dégradés, trafiqués au sucre ou au marc ? On pourrait s’imaginer qu’un système d’AOP anglaise finisse par voir le jour, pour en assurer la qualité… Exactement comme dans la vieille Europe.

Côté packaging, les Anglais innovent et font mieux que les Européens : finis les bouchons en forme de champignon, gloutons en liège, ainsi que les coiffes en aluminium polluantes et inutiles. Neuf distributeurs (Laithwaites, Lidl GB, Naked Wines UK, Naked Wines USA, Sweden’s Systembolaget AB, The Wine Society, Virgin Wines, Waitrose et Whole Foods Market) ont même exigé une réduction du poids des bouteilles de 25 % pour le marché anglais, pour minimiser l’empreinte carbone liée au transport des bouteilles, poste le plus lourd dans le bilan carbone des exploitations. Quant aux bouteilles fines et allongées, elles ne seront plus réservées aux vins alsaciens.

Un vignoble en pleine croissance

Selon le dernier rapport de l’association Wines of Great Britain (2022-2023), la viticulture est le secteur agricole qui connaît la plus forte croissance. Rappelons qu’il n’existe pas moins de 943 vignobles dans tout le pays, la plupart concentrés dans le Sud (le Kent regroupe 26 % des domaines, Sussex Ouest 15 % et Sussex Est 13 %). Depuis cinq ans, cette activité s’étend à une vitesse folle, avec plus de 74 % de surfaces exploitées. L’encépagement est adapté au goût international (chardonnay, pinot noir et meunier) ; côté rouge, les profils de vins tendent à se rapprocher du goût bourguignon, même si le Royaume-Uni produit surtout des vins blancs effervescents (69 % contre 31 % de vins tranquilles).

Wines of Great Britain mise sur une augmentation de 7 600 hectares d’ici 2032, passant de 12,20 millions de bouteilles produites en 2022 à 24,7 millions en 2032. Le secteur emploie aujourd’hui 2 300 personnes et prévoit une croissance de 50 % d’ici à 2025, avec l’embauche de 8 300 personnes supplémentaires dans des emplois saisonniers ou à temps partiel. Un enthousiasme qui étonne, dans un contexte où les ventes de vin chutent drastiquement un peu partout dans le monde.

Cette nouvelle réglementation, devenue possible depuis le Brexit et l’influence du changement climatique, stimulera-t-elle notre curiosité et notre envie de déguster ces nouveaux vins ?

(Extrait d’un article de Marie-Eve Lacasse du 6 novembre 2023.)

Armelle

 

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