BCBG, Bacchus Club des Bons Goûteurs :
Bibliothèque

 

Autres articles : article précédent Table des matières article suivant

L'ŒNOLOGIE POUR TOUS : TRAITEMENT DES MOÛTS ET DES VINS
L'EMPLOI DU DIOXYDE DE SOUFRE

Les principaux effets du soufre :

Employé à faible dose, les nombreuses propriétés du soufre, antiseptiques, antioxydantes et antioxydasiques, en font un auxiliaire précieux pour la vinification. C’est lui qui a permis les longs élevages en barriques ainsi que les longs vieillissements en bouteille. Employé avec excès, il est certes nuisible au vin et à la santé du consommateur, et l’on peut aujourd’hui se passer de lui pour l’élaboration de certains types de vins (généralement assez jeunes et/ou assez acides), mais sans lui nombre de grands vins actuels de garde ne pourraient être produits avec la même qualité.

- Effet antiseptique : Le SO2 a un effet antiseptique polyvalent sur les micro-organismes (plus grand encore sur les levures que sur les bactéries), qu’il peut, selon les doses utilisées et la densité de la population initiale, limiter ou éliminer, autant dans la phase de vinification que de conservation.

- Effet antioxydant : En se combinant en SO3, le SO2 a aussi un effet antioxydant. C’est une opération lente, trop lente pour mettre à elle seule les moûts à l’abri de l’oxydation, mais elle protège efficacement les composés phénoliques et les arômes des vins durant leur élevage et leur vieillissement. De la même façon, en combinant l’éthanal et d’autres produits similaires, il protège l’arôme des vins et fait disparaître le caractère « éventé ».

- Effet antioxydasique : Par son action contre les enzymes d’oxydation (laccases et tyrosinases) il protège efficacement les moûts contre l’oxydation avant leur départ en fermentation (de plus fortes doses peuvent même protéger de la casse oxydasique les vins contaminés par la pourriture grise).

- Dosage : Le SO2 est apporté au vin, au moût ou au bois du fût sous diverses formes : gazeuse, liquide, ou en poudre. Dans tous les cas, les doses sont mesurées en mg/l ou g/hl. De grands progrès ont été réalisés dans la connaissance de la chimie du SO2, qui ont permis de rationaliser son emploi et de diminuer fortement les doses employées. Actuellement, la concentration maximale observée en France est respectivement de 105 mg/l pour les vins blancs et de 75 mg/l pour les vins rouges (contre respectivement 210 mg/l et 160 mg/l autorisés par les normes internationales pour les vins de moins de 4 g/l de sucre résiduel). Chez les liquoreux, le plafond est de 400 mg/l. Le processus de fermentation alcoolique produit de son côté une certaine quantité de SO2, totalement combiné, qui peut atteindre jusqu’à 100 mg/l selon le type de levure concerné. De ce fait même, le vin avec 0% de sulfite n’existe pas.

En raison de ses multiples usages et effets aux divers stades de la vinification, il reste toutefois difficile de fixer une dose idéale permettant de profiter de la totalité de ses avantages sans craindre aucun de ses effets indésirables.

- Toxicité : Chez l’homme, la toxicité se manifeste à partir d’une dose de 4g. A moindres doses, le soufre a un effet broncho-constricteur chez les asthmatiques, et provoque diverses manifestations digestives et cutanées chez les personnes allergiques aux sulfites. La mention « contient des sulfites » doit apparaître sur les bouteilles à partir d’une concentration de seulement 10 mg/l.

SO2 libre versus SO2 combiné :

C’est le SO2 libre (= non combiné à une autre molécule) qui est le plus opérant dans le vin, mais la quantité de SO2 total (= SO2 libre + SO2 combiné) est également importante car il existe un équilibre entre le SO2 libre et le SO2 combiné : toute molécule de SO2 libre qui disparaît entraîne en effet un phénomène de décombinaison du SO2 combiné vers le SO2 libre et tend ainsi à restituer l’équilibre antérieur. Ce mécanisme est avantageux car il prolonge automatiquement la durée de l’efficacité d’une teneur donnée en SO2. La fraction la plus active du SO2 libre est appelée SO2 actif ou « moléculaire ». Cette fraction rend compte, de manière plus précise que le simple SO2 libre, du niveau de protection d'un vin. Le SO2 actif est fonction du pH, de la température, du degré alcoolique et du SO2 libre. C’est le pH qui joue le rôle le plus déterminant dans cet équilibre puisque la proportion de SO2 actif varie de 1 à 10 entre un pH de 4 et un pH de 3 (ce qui veut dire qu’avec un vin très peu acide au pH de 4, il faut 10 fois plus de SO2 total pour obtenir le même effet protecteur qu’avec un vin très acide au pH de 3). La température joue également un rôle dans cet équilibre puisque la proportion de SO2 libre augmente avec elle. C’est ce qui explique qu’un chauffage accroisse le pouvoir stérilisant d’un sulfitage.

Les molécules combinant le SO2 :

Ces molécules sont principalement des sucres, des aldéhydes dont principalement l’éthanal, des corps cétoniques et des polyphénols.

- L’éthanal : Le SO2 libre combine très rapidement l’éthanal, de sorte que l’éthanal ne peut exister dans un vin contenant du SO2 libre. Comme l’éthanal est un produit intermédiaire dans la production d’éthanol à partir des sucres durant le processus fermentaire, il importe de ne plus continuer à sulfiter durant la fermentation car, à ces faibles doses, le SO2 serait immédiatement combiné par l’éthanal sans aucune efficacité antiseptique. En revanche, pour arrêter la fermentation d’un vin doux, il faut utiliser en une seule fois une dose de SO2 assez massive pour bloquer définitivement toute activité levurienne.

- Les acides cétoniques : Ces acides sont des produits secondaires de la fermentation alcoolique. Dans le cas de vendanges atteintes de pourriture noble ou grise ils sont plus abondants, et par leur pouvoir de combinaison ils diminuent fortement la teneur en SO2 libre. Un ajout de vitamine B1 permet de réduire la teneur de ces acides et donc leur effet combinatoire.

- Autres substances combinantes produites par la pourriture grise : Des vendanges contaminées par la pourriture grises donnent un moût plus riche en divers produits secondaires -notamment des sucres autres que le glucose et le fructose ainsi que plusieurs acides indésirables- qui, à des degrés divers, s’attaquent aussi au SO2 en le combinant. Outre l’usage de la thiamine, l’emploi de levures peu génératrices d’éthanal et d’acides indésirables, la filtration et le refroidissement, ainsi que le mutage des liquoreux, permettent toutefois de les combattre afin de limiter les doses de SO2 nécessaires à la stabilisation du vin.

- Les polyphénols : Les polyphénols, dont tout particulièrement les anthocyanes, responsables de la couleur des vins rouges, se combinent aussi au SO2, d’où l’effet décolorant d’une surdose de SO2. Toutefois, ce processus est réversible puisqu’une oxygénation du même vin produit un effet inverse en oxydant le SO2 excédentaire.

Les propriétés antimicrobiennes du SO2 libre

A des doses intermédiaires, le SO2 provoque une inhibition seulement transitoire des levures. C'est pourquoi son usage lors de l'encuvage pour protéger le moût de l'oxydation n'empêche pas pour autant le départ en fermentation dans les jours qui suivent. Ce n’est qu’à des doses plus massives (>100 mg/l) qu’il provoque l’élimination totale des levures. Ces propriétés fongicides du SO2 libre sont particulièrement recherchées pour la stabilisation des vins doux, car le SO2 combiné n’a quasiment aucune action sur les levures. En revanche, le pouvoir du SO2 sur les bactéries est autant lié au SO2 libre qu’au combiné, grâce au fait que ce dernier, bien que moins actif, est présent dans une plus grande proportion. C’est la raison pour laquelle le sulfitage du moût, tout en permettant l’action des levures fermentaires, insensibles au SO2 à mesure que celui-ci se combine, continue à inhiber les bactéries lactiques jusqu’à l’achèvement de la fermentation alcoolique. Il préserve ainsi d’un développement bactérien intempestif en milieu sucré qui pourrait conduire à la production d’acidité volatile.

C’est ce qui explique également pourquoi, chez certains vins au pH très bas, même des doses très faibles de SO2 combiné peuvent rendre la malolactique impossible, ce qui est précisément l’effet recherché pour la plupart des vins blancs classiques. A l’inverse des bactéries lactiques, les bactéries acétiques sont toutefois moins sensibles au SO2, de sorte que le meilleur moyen de lutter contre elles reste la maîtrise de la température et de l’exposition à l’oxygène.

L’emploi du SO2 dans la phase de vinification :

Historiquement, le sulfitage a d’abord été employé pour la seule conservation du vin. Plus récemment il a été introduit durant la phase préfermentaire dans le but d’éviter l’oxydation enzymatique du moût (voire d’éviter la casse oxydasique de vendanges atteintes de pourriture grise). En empêchant leur oxydation, ce léger sulfitage du moût (entre 7 et 10 g/hl) préserve en effet les arômes et n’a pas d’incidence sur l’évolution du bouquet des vins vieux.

En retardant et ralentissant l’activité fermentaire initiale du moût, le SO2 permet également une plus lente et plus faible montée en température, ainsi qu’une fermentation plus achevée par épuisement plus complet des derniers grammes de sucres. Dans la vinification en blanc, ce retard apporté au départ en fermentation permet également d’attendre la chute des particules en suspension et facilite ainsi leur élimination par débourbage statique.

En contribuant à la destructuration de la pellicule du raisin, le sulfitage accélère la libération des composés phénoliques. Ce phénomène est particulièrement sensible en début de sulfitage, avant que la forme libre de SO2 ne soit progressivement combinée par le moût. C’est la raison pour laquelle le sulfitage est déconseillé avant le pressurage des blancs et des rosés, qui cherchent précisément à éviter une extraction plus poussée des composés phénoliques.

Ce léger sulfitage aide également à une victoire plus rapide de Saccharomyces cerevisiae sur ses concurrentes apiculées, souvent plus présentes que les premières lors de l’encuvage. Mais cet intérêt est tout relatif pour les grands vins, dans la mesure où l’action initiale de ces apiculées sur le processus fermentaire semble faire aussi partie de leur bouquet. L’oxydation du moût étant très rapide, un sulfitage à ce moment-là doit se faire en mélangeant en continu et de façon très homogène le SO2 au moût de chaque fraction de vendange dès la sortie du fouloir (un manque d’homogénéité du traitement entraînerait un moût décoloré par endroits par fixation rapide du SO2, tandis que les autres parties de la vendange ne seraient pas protégées).

En revanche, après le départ en fermentation, on a vu que tout ajout de SO2 est inopérant car il est immédiatement combiné par l’éthanal, produit transitoire de la transformation du sucre en éthanol. Le dosage peut être augmenté en fin de période de vendanges, car l’exposition aux contaminations croît avec le temps. De même, le dosage doit être conséquent pour les vins de presse, plus favorables au développement de bactéries.

Pis encore, un excès de SO2 génère des saveurs et odeurs désagréable de réduction : dans le cas d’une fermentation en anaérobiose de type carbonique, ou lorsque le vin est élevé longtemps sur lies, un tel excès de soufre conduit en effet à la formation d’hydrogène sulfuré et de mercaptans, et il peut même compromettre définitivement la malolactique. Une bonne hygiène de la cave, le refroidissement des vendanges et des cuves, et l’usage de gaz inertes permettent de réduire très fortement les doses nécessaires à une bonne protection du moût.

L’emploi du SO2 dans la phase de conservation :

En phase de conservation, notamment après le nouvel apport d’oxygène causé par l’opération d’embouteillage, il y a risque oxydatif en dessous de 10 mg/l pour les vins rouges, 20 mg/l pour les vins blancs, et 30 mg/l pour les liquoreux dont les sucres résiduels importants doivent être empêchés de refermenter. Ce dosage minimal antioxydant protège également des risques microbiologiques. Au cours des premiers jours consécutifs à un apport, le SO2 libre diminue en se combinant aux constituants du vin, puis il continue à baisser de manière régulière en s’oxydant sous forme de sulfate. Sous cette forme sulfitée, il produit une acidification et un durcissement du vin, ce qui est le risque principal d’un trop long élevage en barrique. Un vin trop fortement sulfité prend alors une odeur désagréable de réduction, mais on peut, au moins partiellement, diminuer lentement cet excès en oxygénant le vin afin d’oxyder le SO2.

Le SO2 s’emploie soit sous forme de gaz liquide (difficile à manipuler), soit de bisulfite de potassium (plus facile à manipuler et moins odorant, mais plus difficile à mélanger), soit de métasulfite ou métabisulfite de potassium en poudre à diluer dans de l’eau, soit encore de mèche à brûler dans le tonneau. Le méchage est indispensable pour traiter les fûts, mais c’est un procédé assez acidifiant pour le vin (par production d’acide sulfurique). De plus l’homogénéisation du vin après remplissage du fût doit être assurée par un brassage. Par ailleurs, ce procédé est trop corrosif pour les cuves, même en acier.

nouveau: traduction automatique en 50 langues!!

 

madeonmac

L'abus d'alcool est dangereux pour la santé,
à consommer avec modération.

Webmestre :